Nu’man Ibn Bashir, qu’Allah l’agrée ainsi que son père, a dit :
J’ai entendu le Messager d’Allah ﷺ dire (Nu’man pointa ses deux doigts vers ses oreilles) : “Certes, le licite est clair et l’illicite est clair. Entre les deux, il existe des affaires ambiguës que nombre de gens ne connaissent pas. Celui qui se prémunit contre ces ambiguïtés préserve sa religion et son honneur. Quant à celui qui y tombe, il tombe dans l’illicite. Il est à l’image du berger qui fait paître son troupeau autour d’une réserve, à tout moment il est susceptible d’y paître ces bêtes. Or, chaque roi dispose d’un enclos, et l’enclos d’Allah sont Ses interdits. Certes, dans le corps, il y a un morceau de chair : s’il est sain, tout le corps sera sain, et s’il est corrompu, tout le corps sera corrompu. Il s’agit certainement du cœur!”1
Ce hadith constitue un fondement majeur dans le sujet de la réforme des cœurs, car de la rectitude ou de la corruption du cœur dépend celle des membres.
Cheikh Al Islam Ibn Taymiyyah a dit : “En substance : le cœur est le fondement, comme l’a dit Abou Hourayra, qu’Allah l’agrée : ‘Le cœur est le roi des membres, et ceux-ci sont ses soldats. Si le roi est bon, alors ses soldats le seront également. Mais s’il est corrompu, ses soldats le seront aussi’. Ce qui est en adéquation avec le hadith de Nu’man Ibn Bashir présent dans les deux authentiques, selon lequel le Prophète ﷺ a dit :
Certes, dans le corps, il y a un morceau de chair, s’il est sain, tout le corps sera sain, et s’il est corrompu, tout le corps sera corrompu. Il s’agit certainement du cœur!2
Il en résulte que sa droiture et sa corruption impliquent la droiture et la corruption du corps ; c’est ce qu’il a manifesté et n’a pas caché.
Toutes les obligations qu’Allah a ordonnées aux serviteurs s’imposent d’abord au cœur, car il en est la base, bien que cela puisse ensuite être imposé à autre par suivi. Ainsi, le serviteur, soumis au commandement et à l’interdiction, ne connaît l’ordre et l’interdit que par son cœur. Il vise le cœur par l’obéissance et la conformité. La science de l’injonction et l’intention de se conformer sont présentes avant l’accomplissement de l’ordre, comme dans la prière, la zakat et le jeûne. Si le serviteur se détourne de la connaissance de l’injonction et de l’intention d’obéir, alors la désobéissance commence d’abord dans le cœur. En réalité, c’est le cœur qui est désobéissant, et les membres suivent dans cette désobéissance. C’est pourquoi il a été dit à propos du malheureux :
Mais il n’a ni rendu véridique [la prophétie et le Coran], ni accompli la Salat. Par contre, il a démenti et tourné le dos.—Sourate 75, versets 31-32
Quant aux bienheureux, il est dit dans plusieurs passages :
Ceux qui ont cru et fait de bonnes œuvres.—Sourate 2, verset 277
Les prescriptions sont de deux formes : Un acte apparent réalisé par les membres, et celui-ci ne peut être accompli qu’avec la science du cœur et sa volonté. Le cœur en est la base, comme pour les ablutions mineures et majeures, ou les actes de la prière, tels que la station debout, l’inclinaison et la prosternation. Pour les rites du pèlerinage, comme la station (à Arafat) et la circumambulation. S’il s’agit de paroles, alors le cœur en est le plus concerné. En effet, le cœur doit savoir ce qu’il dit, comment il le dit et ce qu’il vise par cela.”3
Il devient ainsi clair que le cœur est la fondation de toutes les actions et paroles :
- En ce qui concerne les commandements d’Allah relatifs aux actions visibles, celles-ci doivent être accomplies sur la base de la connaissance et de l’intention du cœur.
- De même, pour les paroles qu’Il a ordonnées, celles-ci doivent être prononcées avec la connaissance et l’intention du cœur.
Par ce qui précède, on comprend que si le cœur est rempli de foi en Allah, de Son amour, de Sa magnification, de Sa crainte, de l’espoir en Lui, de la pleine confiance en Lui, et du culte qui Lui est exclusivement dédié, alors les membres deviennent bons et se rectifient. Aucune prescription ne peut être correctement accomplie extérieurement sans ces éléments. En leur absence, accomplir des actions visibles relève de l’hypocrisie. Ces éléments internes poussent naturellement à des actions extérieures qui leur correspondent en pureté et en droiture.
Ainsi, la connaissance des règles relatives aux cœurs est plus importante que celle des membres du corps, car elles en sont la base à partir de laquelle se ramifient les règles liées aux actions physiques. C’est également sur cela que se pose le regard du Seigneur, comme cela est rapporté par Muslim dans son Sahih, d’après Abou Hourayra, qui a dit :
Le Messager d’Allah ﷺ a dit : “Certes, Allah ne regarde pas vos corps ni vos apparences, mais Il regarde vos cœurs.”4
Puis il pointa son doigt vers sa poitrine.
Muslim et Ahmad rapportent, selon Abou Hourayra, que le Prophète ﷺ a dit :
La crainte pieuse [Taqwa] est ici, et il pointa son doigt vers sa poitrine, trois fois.5
Le cœur est donc la base : s’il demeure ferme, sincèrement et véritablement dans sa piété envers Allah, alors tous les membres le suivront également. Ils œuvreront dans l’obéissance d’Allah et rechercheront Son agréement.
Dans le Mousnad, d’après Anas Ibn Malik, le Messager d’Allah ﷺ a dit :
La foi d’un serviteur n’est pas droite tant que son cœur n’est pas droit.6
Al Hafidh Ibn Rajab a dit : “Ce qui est visé par la droiture de la foi, c’est la droiture des actions accomplies par les membres, car les membres ne peuvent être droits sans la droiture du cœur. Le sens de la droiture du cœur est qu’il soit imprégné de l’amour d’Allah, de Son obéissance, et de l’aversion pour Sa désobéissance.7
Al Hasan a dit à un homme : “Soignes ton cœur, car Allah veut la réforme de leurs cœurs”8. Cela signifie qu’Il veut d’eux qu’ils purifient leurs cœurs, et cela ne peut se réaliser tant que le cœur n’est pas ancré dans la connaissance d’Allah, Sa magnification, Son amour, Sa crainte empreinte de connaissance, Sa grandeur, Son espoir, Sa pleine confiance, jusqu’à en être pleinement imprégné. C’est la réalité du Tawhid, et le sens de La Ilaha Illa Allah [nulle divinité ne mérite l’adoration en dehors d’Allah]9. Ainsi, les cœurs ne peuvent se réformer tant qu’ils ne divinisent pas et ne se soumettent pas à Allah seul, sans associé, qu’ils ne Le connaissent, ne L’aiment, et ne Le craignent avec science. S’il y avait eu une [véritable] divinité dans les cieux et la terre en dehors d’Allah, alors les cieux et la terre auraient été corrompus, comme Allah l’a dit (dans le sens approché) :
S’il y avait dans le ciel et la terre des divinités autres qu’Allah, tous deux seraient certes dans le désordre. —Sourate Al Anbiya, v.22
On comprend alors que la réforme des mondes, tant dans les cieux que sur la terre, se réalise lorsque les mouvements qui animent les cœurs sont entièrement voués à Allah seul. Les mouvements du corps suivent ceux du cœur et sa volonté. Ainsi, si ces impulsions et cette volonté sont dirigées vers Allah seul, alors la réforme et la rectitude dans les actions corporelles seront atteintes dans leur intégralité. En revanche, si les impulsions du cœur et sa volonté se tournent vers autre chose qu’Allah, alors le cœur sera corrompu, et les actions du corps le seront également, en fonction du degré de corruption des impulsions du cœur”.10
Il est rapporté dans le Mousnad que le Prophète ﷺ a dit :
Celui qui donne en Allah, interdit en Allah, aime en Allah et déteste en Allah a alors complété la foi.11
Le sens de cela est que les mouvements du cœur et des membres, lorsqu’ils sont tous voués à Allah, permettent au serviteur de compléter sa foi, tant de manière apparente que cachée. La réforme des impulsions du cœur entraîne celle des membres. Si le cœur est pieux et qu’il ne renferme que la volonté d’Allah et la recherche de Son agrément, alors les membres agiront uniquement selon ce qu’Allah veut. Ainsi, ils se hâteront vers ce qui Lui plaît et cesseront de faire ce qu’Il déteste, ou de commettre des actes pouvant être détestés12, sans pour autant en avoir la certitude."13
C’est pourquoi la question de la rectitude du coeur est un sujet important ; un grand nombre de personne peuvent se soucier de la rectitude apparente mais sont insouciant à la rectitude cachée par l’obéissance et la belle orientation vers Allah, et l’éloignement par le coeur des maux du coeur et ses maladies qui l’éloigne de la rectitude.
Les cœurs sont sujets aux maux, aux maladies persistantes et aux pathologies, qui affaiblissent et diminuent la foi et l’obéissance à Allah qu’ils contiennent. Fait partie de la rectitude sur l’obéissance à Allah de veiller à la guérison des cœurs et des êtres, et à lutter pour s’éloigner des maux et des pathologies qui peuvent les affecter et les rendre malades. Tout comme les corps tombent malades, les cœurs aussi, mais leurs maladies sont plus graves et plus dangereuses que celles du corps14.
Il incombe tout particulièrement en ce qui concerne le cœur, de le préserver de ces maladies et pathologies. C’est cela qui sera d’un grand bénéfice pour le serviteur le jour où il rencontrera Allah et se présentera devant Lui. Allah a dit (dans le sens approché) :
Le jour où ni les biens, ni les enfants ne seront d’aucune utilité, sauf celui qui viendra à Allah avec un cœur sain.—Sourate 26, v.88-89
Le cœur sain est celui qui a été épargné du shirk et du doute, de tout ce qui provoque la colère d’Allah, ainsi que de la persistance dans les innovations et les péchés. Cette pureté vis-à-vis de ces choses implique de se parer de leurs contraires, comme la sincérité envers Allah, la certitude, Son obéissance, Son amour, Sa vénération, et l’honneur de Sa législation. Si le cœur possède ces caractéristiques tout en étant exempt de leurs opposés, alors il sera sain et connaîtra le salut le jour de la résurrection et les hauts degrés le jour où il rencontrera Allah.15
Ibn Al Qayyim, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit : “Il y a eu différentes explications données au cœur sain, mais on peut toutes les résumer en disant qu’il s’agit du cœur qui a été préservé de toute passion qui s’oppose aux ordres d’Allah et à Ses interdits, et de toute ambiguïté qui contredit Ses informations. Il a été épargné de l’adoration d’autre que Lui, et de juger selon une autre législation que celle de Son messager. Il a été épuré dans l’amour qu’il porte à Allah tout en suivant le jugement de Son messager dans sa crainte, son espoir, sa totale confiance, son retour à Lui, sa soumission, en préférant Son agrément dans toute situation, et en s’éloignant de tout chemin qui cause Sa colère. Ceci est la réalité de la servitude qui ne revient qu’à Allah.
Ainsi, le cœur sain est celui qui a été préservé de contenir pour autre qu’Allah une quelconque forme de shirk ; il a adoré uniquement Allah par l’amour, la totale confiance, le repentir, l’humilité, la crainte empreinte de connaissance, et l’espoir. Il a œuvré uniquement pour Allah. Ainsi, s’il aime, il n’aime qu’en Allah ; s’il déteste, il ne déteste qu’en Allah ; s’il donne, il ne donne que pour Allah ; s’il interdit, il n’interdit que pour Allah. Et cela ne peut suffire tant qu’il n’est pas préservé de la soumission et du jugement de tout ennemi à Son messager. Son coeur est résolu et ferme à le prendre comme Imam et à le suivre, lui seul, dans les paroles et les actions :
- Les paroles du cœur, qui sont les croyances;
- celles de la langue, qui expriment ce qu’il y a dans le cœur;
- les actions du cœur, qui sont la volonté, l’amour, la détestation et leurs conséquences;
- ainsi que les actions des membres du corps.
Dans toutes ces choses, aussi minimes ou considérables soient-elles, il juge selon ce sur quoi est venu le messager, il ne le devance pas dans une croyance, une parole ou une action, comme Allah a dit (dans le sens approché) :
Ô vous qui avez cru! Ne devancez pas Allah et Son messager.—Sourate 49, v.1
C’est-à-dire, ne dite pas tant qu’il n’a pas dit, ne faite pas tant qu’il n’a pas ordonné.
Certains prédécesseurs ont dit : ‘Il n’y a pas une action, si petite soit-elle, sans qu’elle soit jugée suivant deux registres : pourquoi et comment ? C’est-à-dire, pourquoi l’as-tu faite ? Et comment l’as-tu faite ?’16
Le premier concerne la raison de l’action, sa motivation et son motif : est-ce pour un intérêt immédiat parmi les intérêts terrestres, pour un profit mondain comme l’éloge des gens ou la crainte de leur blâme, pour attirer une chose aimée ou éloigner une chose indésirable ? Ou bien la motivation de l’action est-elle de réaliser le droit de la servitude, de rechercher l’amour et la proximité du Seigneur, ainsi que les moyens de se rapprocher de Lui.
Cette question, en substance : as-tu fait cette action pour ton Maître ou pour ton propre intérêt et tes désirs ?
La deuxième question, quant à elle, touche le suivi du Messager ﷺ dans cette adoration. Autrement dit, cette action était-elle conforme à ce que J’ai légiféré pour toi par l’intermédiaire de Mon Messager, ou était-ce une œuvre que Je n’ai pas légiférée et que Je n’ai pas agréée ?
Ainsi, le premier questionnement porte sur la sincérité, et le second sur la conformité à la voie prophétique. Allah n’accepte aucune action sans ces deux conditions.
La voie permettant de répondre à la première question est la purification de la sincérité, et pour la seconde, c’est la concrétisation du suivi (du Messager d’Allah ﷺ). L’épuration du cœur de toute intention qui s’oppose à la sincérité et de tout désir qui s’oppose à la conformité, telle est la réalité du cœur sain qui lui assure le salut et le bonheur.”17
Parmi les signes d’un cœur sain :
Qu’il se détache de la vie d’ici-bas, en se détournant d’elle sans être trompé, conscient de sa véritable nature, à savoir qu’elle est une demeure temporaire vouée à disparaître, une simple étape d’un voyage, et non éternelle. Comme ‘Ali, qu’Allah l’agrée, a dit : “Certes, la vie d’ici-bas s’éloigne et la vie de l’au-delà s’approche, et chacune d’elles a ses enfants. Soyez donc les enfants de l’au-delà et non les enfants de la vie terrestre, car aujourd’hui est un jour d’actions sans jugement, et demain sera un jour de jugement sans actions.”18
Que son aspiration soit unique : obtenir l’agrément d’Allah et éviter Son courroux.19
Qu’il s’efforce et s’applique à s’éloigner des péchés, des actes blâmables, des innovations et des interdits. Allah a dit (sens approché) :
Et quant à ceux qui luttent pour Notre cause, Nous les guiderons certes sur Nos sentiers. Allah est en vérité avec les bienfaisants.—Sourate 29, v.6920
Qu’il accorde plus d’attention à la validité de l’œuvre qu’à l’action en elle-même, avec sincérité et vérité vis-à-vis d’Allah, en épurant l’adoration qui Lui est vouée, tout en étant conscient de la faveur d’Allah, et en reconnaissant ses propres manquements à l’égard du droit d’Allah, en soumettant son être à l’obéissance d’Allah.21
Le croyant doit être ainsi, se soucier de son cœur, s’efforcer de le réformer, et s’appliquer à le purifier et l’épurer. Parmi les invocations rapportées :
Ô Allah, accorde à mon âme sa piété. Et purifie-la, car Tu es le meilleur de ceux qui la purifient. Tu es son Allié et son Maître.22
Et dans le hadith que le Prophète ﷺ a enseigné a Shadad Ibn Aws, qu’Allah l’agrée:
Lorsque tu verras les gens faire des réserves d’or et d’argent, tu dois faire des réserves de ces paroles : ‘Ô Allah! Je Te demande l’affermissement dans toute chose et la ferme intention vers la droiture. Je Te demande de m’accorder ce qui va me permettre d’obtenir Ta miséricorde et d’atteindre Ton pardon. Je Te demande de m’accorder le remerciement de Tes bienfaits et de t’adorer de la meilleure manière. Je Te demande un coeur sain et une langue véridique. Je Te demande le bien dont Tu sais, de me protéger contre le mal dont Tu sais et de me pardonner ce dont Tu sais. Tu es certes le Savant de l’invisible’.23
C’est un hadith authentique qui englobe tout le bien, regroupe les portes de la bonté et concentre les mérites. Le Prophète ﷺ a particulièrement insisté sur le soin que l’on doit porter à cette invocation et à la réalisation des grandes demandes qu’elle renferme et de ses nobles objectifs. En particulier, ce qui a trait à la préservation du cœur, par son épuration, sa purification de tout ce qui cause la colère d’Allah, notamment l’association à Allah (shirk), le doute dans la religion, la persistance dans les innovations et les péchés, ainsi que d’autres maux qui touchent le cœur et l’affectent gravement.
Je demande à Allah qu’Il nous accorde la réussite dans tout bien, qu’Il réforme l’ensemble de nos états. Il est certes Celui qui entend, qui est proche et qui exauce.
Traduction: Azwaw Abou ‘Abd Al Razzaq
Rapporté par Al Bukhari (52) et Muslim (1599).
[C] Ce hadith, qui est le premier hadith de ce livre, est rapporté par Nu’man Ibn Bashir, qu’Allah l’agrée ainsi que son père et tous les compagnons. Il compte parmi les jeunes compagnons. Quand le Prophète ﷺ est mort, il avait huit ans ; il a donc pu entendre ce hadith du Prophète ﷺ à l’âge de six ou sept ans. Et pourtant, il a appris et transmis à la communauté ce grand hadith. J’attire ici l’attention sur un point particulier : cet éminent hadith rapporté par ce jeune compagnon montre qu’il convient d’éduquer les jeunes dans cet esprit de réforme des cœurs, tout comme il revient aux plus âgés de l’étudier. Ce compagnon a entendu ce hadith du Prophète ﷺ alors qu’il était dans sa jeunesse, il l’a appris, maîtrisé, et l’a transmis à la communauté. Le Prophète ﷺ a dit : “Qu’Allah fasse resplendir de beauté celui qui a entendu mes propos, puis les a saisis, mémorisés et transmis.” [Al Tirmidhi (2658) et authentifié par Cheikh Al Albani]. C’est ainsi qu’a agi ce compagnon, qu’Allah l’agrée.
Ce hadith englobe de nombreux points :
Le Halal et le Haram. Le Prophète ﷺ commence en disant : " Le licite est clair et l’illicite est clair. " Cela se réfère à ce qu’Allah a clarifié dans Son Livre et ce que Son Messager ﷺ a clarifié dans sa Sunnah. Entre le Halal et le Haram, il y a des choses ambiguës ; la personne qui y porte attention ne peut discerner si ces choses comptent parmi les choses licites ou illicites. Cette confusion touche un grand nombre de personnes qui ont une faible connaissance de la science légiférée, mais elle ne concerne pas les savants fermement enracinés dans la science, en raison de la clairvoyance et de la compréhension qu’Allah leur a accordées. C’est pour cela qu’il a dit : " nombre de gens ne les connaissent pas. " Ainsi, beaucoup de gens s’orientent vers les savants pour demander le jugement sur une situation qui leur pose problème et qui leur paraît ambiguë, en disant : " Quel est le jugement de cette vente… ou de cette action… de cette question ? " Le savant leur répond : " Cette chose est permise selon cette preuve… “, ou qu’elle n’est pas permise, puis il cite le hadith et l’argument qui fait foi, etc. Ensuite, le Prophète ﷺ indique ce qu’il convient de faire en cas d’ambiguïté, lorsque la personne ne sait pas si la chose est autorisée ou non : “Celui qui se prémunit contre ces ambiguïtés préserve sa religion et son honneur”. Dans ce contexte, il revient à la personne de s’écarter de ces ambiguïtés jusqu’à ce que la chose devienne claire. Elle préserve ainsi sa religion, à savoir ce qu’il y a entre elle et Allah, mais aussi son honneur, ce qu’il y a entre elle et les gens. Tandis que la personne qui s’accommode des ambiguïtés finira par tomber dans l’illicite. Le Prophète ﷺ l’illustre en disant : “Il est à l’image du berger qui fait paître son troupeau autour d’une réserve, à tout moment il est susceptible d’y paître ces bêtes”. Il est comme celui qui ne se préoccupe pas des ambiguïtés, dont la négligence le mènera vers les interdits. “Or, chaque roi dispose d’un enclos, et l’enclos d’Allah sont Ses interdits”. Cet enclos qu’Allah a interdit à Ses serviteurs d’approcher et de franchir représente Ses interdits, qu’Il a prohibés.
L’importance du cœur. Que ce soit dans ce sujet en particulier évoqué dans le hadith* ou dans tout autre sujet religieux, le Prophète ﷺ met en lumière l’importance du cœur en disant : “Certes, dans le corps, il y a un morceau de chair : s’il est sain, tout le corps sera sain, et s’il est corrompu, tout le corps sera corrompu. Il s’agit certainement du cœur!”. Le terme employé dans le hadith, " Mudghat “, fait référence à une bouchée ; il s’agit donc d’un petit morceau de chair. Mais malgré cette petitesse, il a une importance immense, car il exerce une influence globale sur l’ensemble des membres du corps. Les membres ne peuvent agir en opposition à la volonté du cœur, que ce soit en bien ou en mal, dans ce qui est sain ou corrompu. Il y a donc dans ce hadith un avertissement du Prophète ﷺ pour tout musulman : qu’il veille à la réforme de son cœur et prenne garde à sa corruption. Car si le cœur est sain, tous les membres le seront ; s’il est corrompu, ils le seront aussi. Il est donc obligatoire pour chaque musulman de porter une attention particulière à la réforme de son cœur, en empruntant les voies et en prenant les causes légiférées qui l’aideront dans ce but, tout en s’éloignant des sources de sa corruption. Dans toutes ces situations, il invoque Allah, car les cœurs sont entre deux des doigts du Tout-Miséricordieux, et Il les fait tourner comme Il le veut [cf. Hadith ‘Abd Allah Ibn ‘Amr, Sahih Muslim (2654)].
*[NDT] Cheikh ‘Abd Al Muhsin Al ‘Abbad, qu’Allah le préserve, a dit dans sa célèbre explication des quarante hadiths d’Al Nawawi : “Il a mentionné cette phrase après avoir traité de l’obligation de délaisser l’illicite et les choses ambiguës, afin d’éviter d’être entraîné vers ce qui est interdit. Cela indique que la pureté des revenus licites et le souci de les maintenir loin des interdits et des zones de doute contribuent à la droiture ou à la corruption du cœur. En effet, consommer ce qui est interdit et s’y adonner mène à la corruption du cœur, tandis que rechercher un gain licite et s’éloigner de l’interdit favorisent sa réforme. Car le cœur se réforme par la droiture de son détenteur dans l’obéissance à Allah et à Son Messager ﷺ, en appliquant les commandements et en délaissant les interdits. C’est cela la Taqwa, la crainte pieuse d’Allah : que la personne place entre elle-même et la colère et le châtiment d’Allah une protection qui la prémunisse. Cela se concrétise par l’accomplissement des ordres et le délaissement des interdits. C’est pour cette raison que le Prophète ﷺ a mentionné le cœur après avoir évoqué le licite et l’illicite.” [cf. Cours 10]
Il est rapporté que Nu’man Ibn Bashir, qu’Allah les agrée, a transmis cent quatorze hadiths [cf. Siyar A’lam Al-Nubala (3/411)]. Dans d’autres cours, Cheikh ‘Abd Al Razzaq Al Badr, qu’Allah le préserve, a souligné l’importance d’éduquer les enfants à la science, à la Sunnah, et à l’amour des hadiths du Prophète ﷺ. Il recommande, par exemple, de leur enseigner les quarante hadiths d’Al Nawawi [un conseil que le Cheikh répète souvent, et un grand bien pour celui qui le suit]. Lorsqu’on arrive à ce hadith, le père ou la mère peut encourager l’enfant en lui disant : “Regarde ce compagnon qui avait moins de huit ans a retenu ce hadith dès la première fois ! Toi aussi, tu en es capable par l’aide d’Allah”. De même, ils veillent à faire participer leurs enfants aux cours des savants pour qu’ils en tirent des leçons. Cette mémorisation et ces enseignements peuvent, par la permission d’Allah, être une source de bien pour eux, pour les parents [par la récompense qu’ils recevront], et pour la communauté. À l’image de ce noble compagnon qui, contrairement à beaucoup de jeunes, n’a pas employé sa mémoire dans des choses futiles mais a rapporté un hadith qui compte parmi les fondements de la religion. Certains savants ont même dit de ce hadith qu’il constitue le tiers de la religion. ↩︎
[C] La parole de Cheikh Al Islam Ibn Taymiyyah, qu’Allah lui fasse miséricorde, montre que le cœur est la base, c’est-à-dire que toutes les actions de l’individu émanent de cette base qui est le cœur. Si le cœur est la base, que sont les membres du corps ? Ils le suivent dans son état, qu’il s’agisse d’intégrité ou de perversion. Dans d’autres écrits, Cheikh Al Islam a stipulé que la parole du Prophète ﷺ est plus complète que celle d’Ibn Massoud. En effet, si le cœur est réformé, les membres le seront obligatoirement, et s’il est corrompu, les membres le seront forcément. C’est un suivi du cœur complet. Tandis que l’image donnée par Abou Hourayra vise à faciliter la compréhension de ce sens. Mais la parole du Prophète ﷺ est plus achevée, car le roi peut être intègre alors que certains de ses soldats peuvent être corrompus, ou bien il peut être à son tour perverti alors que certains soldats peuvent être intègres.
[NDT] Cheikh Al Islam Ibn Taymiyyah a dit : “La parole du Prophète ﷺ est davantage explicite. En effet, bien que le roi soit pieux, il n’en reste pas moins que ses soldats ont un libre arbitre et peuvent donc lui désobéir. Ou bien le contraire peut se présenter : certains soldats peuvent être intègres alors que lui peut être corrompu, et vice-versa. Contrairement au cœur, dont le corps ne peut que suivre, car il ne saurait se soustraire à sa volonté, comme l’a dit le Prophète ﷺ : ‘S’il est sain, tout le corps sera sain, et s’il est corrompu, tout le corps sera corrompu’.” [Majmu’ Al Fatawa (7/187)] ↩︎
Majmou’ Al Fatawa (14/113-115).
[C] Si nous observons les obligations religieuses, comme la prière, le jeûne, le pèlerinage, la Zakat, etc., l’obligation du cœur s’impose avant l’action en elle-même, car le cœur est la base. Deux choses sont demandées au cœur : la science de la vérité et la détermination à accomplir cette vérité. Si le cœur se détourne de ces deux points vis-à-vis du commandement d’Allah, alors la désobéissance émane d’abord de ce cœur. C’est par sa négligence, qu’elle concerne la science ou la détermination. ‘Mais il n’a ni rendu véridique [la prophétie et le Coran]’, ceci touche le cœur corrompu, ’ni accompli la Salat’, ce qui découle de l’état du cœur ; ainsi, ses actions sont également perverties. S’il avait rendu véridique, ses membres se seraient soumis et auraient été droits. C’est pour cela que dans de nombreux versets, Allah décrit les bienheureux en disant ‘ceux qui ont cru’. Si le cœur est illuminé par la foi, alors les actions seront bonnes, c’est pourquoi Il fait suivre cette croyance en disant ’et ont fait de bonnes actions’.
[NDT] C’est pourquoi les paroles ne sont prises en compte dans la législation que si elles proviennent d’une personne raisonnable, consciente de ce qu’elle dit et de ce qu’elle vise. Après avoir détaillé cette question en prenant l’exemple de l’enfant, du fou et de l’ivrogne, Cheikh Al Islam Ibn Taymiyyah continua en disant : “Les prescriptions, comme nous l’avons évoqué, se présentent sous deux formes : celles qui sont apparentes, réalisées par les membres, et celles qui sont cachées dans le cœur. La deuxième forme concerne ce qui est caché dans le cœur, comme la sincérité, l’amour d’Allah et de Son Messager ﷺ, la pleine confiance en Allah, la crainte que l’on a de Lui, ainsi que la foi du cœur et sa confirmation des informations transmises par le Messager ﷺ. Le lien qui existe entre le cœur et cette forme est manifeste, puisqu’il en est le siège. Cette forme est la base de la première, et sa source de bien ou de mal est plus profonde que la première. Aucun commandement apparent ne peut être accompli sans la foi du cœur, l’amour et la magnification d’Allah, Sa crainte, Son espoir, Sa pleine confiance et Son culte exclusif. Si une personne accomplit des actions apparentes sans ces éléments, elle est alors hypocrite. Elles [les actions et paroles internes] conduisent naturellement à des actions visibles qui leur correspondent et elles sont plus nobles que leurs branches [apparentes]. Comme Allah le Très-Haut a dit (dans le sens approché) : “Ce n’est ni leur chair ni leur sang qui parvient à Allah, mais c’est votre piété qui Lui parvient”.” [Sourate 22, v. 37] ↩︎
Rapporté par Muslim (2564). ↩︎
Rapporté par Muslim (2564) et Ahmad (8828).
[C] Ces deux hadiths montrent que les règles liées au cœur sont plus importantes que celles des membres, même si toutes restent essentielles. Les règles du cœur prévalent car elles constituent la base de tout ; c’est ce que regarde Le Seigneur : “mais Il regarde vos cœurs”. Une personne peut accomplir en apparence des actions pieuses sans que son cœur soit sincère ; elle agit alors, par exemple, par ostentation ou par intérêt. Allah regarde donc d’abord les cœurs et en examine la rectitude, la pureté et la droiture, ou, lorsqu’il est corrompu, les déviations et les dérives qui en découlent. Dans le hadith rapporté par Abou Hurayra, le Prophète ﷺ a dit : “La crainte pieuse [Taqwa] est ici”, et il pointa trois fois son doigt vers sa poitrine. Cela signifie que sa source, sa base et son fondement résident dans le cœur. Comme Allah l’a dit (dans le sens approché) : “Voilà [ce qui est prescrit]. Et quiconque exalte les symboles d’Allah [les signes apparents de la religion], cela émane de la piété des cœurs” [Sourate 22, v.32]. L’exaltation des symboles du Hajj renvoie donc à cette base qu’est le cœur. Le Prophète ﷺ a montré sa poitrine trois fois de suite pour souligner la gravité et l’importance du cœur en ce qui concerne la crainte pieuse et sa réalisation. La Taqwa consiste à œuvrer dans l’obéissance à Allah, avec une lumière provenant de Lui, en espérant Sa récompense, et à délaisser la désobéissance, avec une lumière provenant de Lui, en redoutant Son châtiment. La base de tout cela est le cœur.
[NDT] Ibn Al Qayyim, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit : “L’action du cœur est l’âme de l’adoration et son noyau. Ainsi, si l’action des membres en est dépourvue, elle devient comme un corps mort sans âme… Celui qui médite la législation dans ses sources et ses ressources saura le lien qui existe entre les actions du corps et celles du coeur, et quelles ne seraient être bénéfiques sans ces dernières. Le croyant et l’hypocrite ne se distinguent-ils pas par ce que contiennent leurs cœurs comme actions, lesquelles les caractérisent tous deux ? N’est-ce pas que la personne qui veut embrasser l’islam le fait par l’action de son coeur avant celui de ses membres. Les adorations du coeur son plus vastes que celles du corps, elles sont plus grandes et plus durables. Ainsi elles sont obligatoires à chaque instant, c’est pourquoi la foi est une obligation constante pour le coeur, et l’islam est une obligation ponctuelle pour les membres.”[Bada’i Al Fawaïd (3/192-193)] ↩︎
Rapporté par Ahmad (13048) et authentifié par Al Albani dans Silsilah Al Sahiha (2841).
[C] Un grand hadith se rapporte à cette thématique : “La foi d’un serviteur n’est pas droite tant que son cœur n’est pas droit”. Cela signifie que la droiture du cœur réside dans l’obéissance à Allah, dans Son amour, dans l’amour de Son messager, et dans l’imitation de ce dernier. Si le cœur est droit dans ces aspects, les membres suivront également cette rectitude. Le terme “foi” employé dans “La foi d’un serviteur n’est pas droite” désigne la droiture des actions, car les actions sont aussi appelées “foi” : “Et Allah ne fera jamais perdre votre foi” [Sourate 3, v.144], c’est-à-dire “votre prière”, car Il a utilisé le terme “foi” pour désigner la prière, montrant que toutes les œuvres pieuses font partie de la foi. ↩︎
[NDT] Le Cheikh a souligné l’importance de cette parole, qui définit excellemment la droiture du cœur : “La droiture du cœur consiste à ce qu’il soit imprégné de l’amour d’Allah, de Son obéissance, et de l’aversion pour Sa désobéissance.” ↩︎
Rapporté par Ibn Abi Al Dounya dans Al Tawadu’ Wal Khumul (240), et par Abu Nu’aym dans Hilyat Al Awliya (2/154). ↩︎
[C] C’est une observation remarquable de l’imam Ibn Rajab, qu’Allah lui fasse miséricorde : la base de la réforme du cœur repose sur le Tawhid du Créateur. Si le cœur se réforme par le Tawhid, par sa concrétisation, et qu’il en est rempli par les adorations, comme celles qu’il a citées, qui sont toutes des adorations du cœur ayant pour finalité le Tawhid de Celui qui connaît l’invisible [Allah]. Ainsi, la base des actions des membres repose sur le cœur, et la base de la réforme du cœur réside dans le Tawhid d’Allah. ↩︎
Jami’ Al ‘Ulum Wal Hikam (1/220). ↩︎
Rapporté par Abou Daoud (4681) et authentifié par Al Albani. ↩︎
- [C] Comme nous l’avons vu précédemment dans le hadith de Nu’man
- “Celui qui se prémunit contre ces ambiguïtés préserve sa religion et son honneur.” Si une personne a la certitude qu’Allah déteste une chose, ou pense qu’elle peut être détestée par Allah, elle s’en écarte, préservant ainsi sa religion et son honneur.
Jami’ Al ‘Ulum Wal Hikam (1/222). ↩︎
[C] Les cœurs sont comme des récipients qui peuvent être atteints par des éléments qui les corrompent. Généralement, cela se produit par deux voies : celle de l’ouïe et celle de la vue. C’est pourquoi Allah a réuni ces trois choses dans le verset : “L’ouïe, la vue et le cœur : sur tout cela, en vérité, vous serez interrogés” [Sourate 17, v.36]. Par ces voies, le cœur se corrompt et tombe malade, soit à cause des ambiguïtés, soit en raison des passions. Si tel est le cas des cœurs, qui sont sujets à des facteurs et des maladies qui les affaiblissent et font diminuer la foi, il revient au serviteur de travailler pour soigner son cœur [cf. parole de Hassan Al-Basri]. Si tu sens que ton cœur contient une maladie, alors agis pour qu’elle en sorte et pour être épargné de son mal et de ses nuisances, par l’invocation et en combattant le Nafs. Si le corps apparent peut être touché par la maladie, la personne fournit les efforts nécessaires pour le soigner en recherchant son remède. De même, le cœur peut aussi tomber malade et sa maladie est plus grave. En effet, la maladie du corps, pour le croyant, jusqu’à l’aiguille qui le pique, est une expiation et une purification, c’est donc une porte de bien pour lui*. Par contre, les maladies du cœur, qu’elles soient liées aux ambiguïtés ou aux passions, sont une grande perdition. C’est pour ces raisons que la personne doit s’intéresser davantage à soigner son cœur qu’à soigner son corps.
- *[NDT] D’après Abu Hurayra, qu’Allah l’agrée, le Prophète ﷺ a dit
- “Tout ce qui touche le musulman, qu’il s’agisse de fatigue, de maladie, de soucis, de tristesse, de gêne, d’angoisse, voire même d’une épine qui le pique, est une expiation de la part d’Allah pour ses péchés.” [Rapporté par Al Bukhari (5641) et Muslim (2573)]
D’après ‘Aicha, qu’Allah soit satisfait d’elle, le Messager d’Allah ﷺ a dit : “Le croyant n’est touché ni par une épine, ni par d’avantage, sans qu’Allah ne l’élève d’un degré et n’efface un péché.” [Rapporté par Al Tirmidhi et authentifié par Cheikh Al Albani dans Sahih Al Jami’ (7731)].
Dans le hadith de Abu Hourayra, qu’Allah l’agrée, il a été cité la tristesse (Al Housn), l’angoisse (Al Gham) et le souci (Al Ham). Ces trois états sont respectivement liés aux événements passés, présents et futurs. [Cf. Explication de Tajrid Al Sarih Li Ahadith Al Jami’ Al Sahih par Cheikh ‘Abd Al Razzaq Al Badr, qu’Allah le préserve, cours 236]
Dans le hadith de ‘Aicha, qu’Allah soit satisfait d’elle, l’expression “ni par davantage” peut soit faire référence à quelque chose de plus petit que cette épine qui atteint le croyant, soit à une épreuve plus grande que celle-ci. [Se référer à l’explication de Sunan Al Tirmidhi par Cheikh ‘Abd Al Muhsin Al ‘Abbad, qu’Allah le préserve, cours 118]
Cette expiation des péchés est une miséricorde d’Allah sur Ses serviteurs, qui se réalise pour celui ou celle qui patiente et espère la récompense d’Allah. C’est une spécificité des croyants, comme cela est mentionné dans le hadith de Suhayb Ibn Sinan Al Rumi, qu’Allah l’agrée, où le Messager d’Allah ﷺ a dit : “Que le cas du croyant est étonnant! Tout ce qui lui advient est bénéfique, et cela n’est réservé qu’à lui seul. En effet, s’il est l’objet d’un événement heureux, il se montre reconnaissant et c’est un bien pour lui. Et si un malheur l’atteint, il l’endure avec patience et c’est là encore un bien pour lui.” [Sahih Muslim (2999)] ↩︎
[C] Celui qui souhaite la réforme de son cœur doit méditer sur ce verset jusqu’à ce qu’il ait un effet sur son cœur, l’incitant à œuvrer pour atteindre l’objectif d’avoir un cœur sain, exempt de toute forme de shirk [cf. parole précédente sur la réforme du cœur par le Tawhid], d’innovation, dont certains éléments concernent le cœur et sur lesquels reposent les innovations apparentes, ainsi que des péchés. Il doit s’écarter de tout ce qui provoque la colère d’Allah, comme shirk, innovation et péché, afin de purifier son cœur et être sauvé le jour de la Résurrection : “Le jour où ni les biens, ni les enfants ne seront d’aucune utilité, sauf celui qui viendra à Allah avec un cœur sain.” [Sourate 26, v.88-89] ↩︎
[C] Les savants ont qualifié le cœur sain de plusieurs façons, mais toutes peuvent être résumées ainsi : il s’agit du cœur préservé des passions et des ambiguïtés, car toutes les maladies qui l’affectent relèvent de ces deux catégories. Les passions ont trait aux actions, et les ambiguïtés à la science, l’un concernant les commandements d’Allah et l’autre Ses révélations. Le cœur sain est donc celui “qui a été épargné de l’adoration d’un autre que Lui et du jugement selon une autre législation que celle de Son messager”. Ce sont les deux fondements sur lesquels repose la santé du cœur : le Tawhid et le suivi conforme. Certains savants les appellent respectivement Tawhid Al Mursil [le Tawhid de Celui qui envoie, c’est-à-dire Allah, par la sincérité] et Tawhid Al Mursal [le Tawhid de celui qui est envoyé, c’est-à-dire le Messager d’Allah ﷺ, par le suivi]*. Certains prédécesseurs ont dit : “Il n’y a pas une action, si petite soit-elle, sans qu’elle soit jugée selon deux critères : pourquoi et comment ? C’est-à-dire, pourquoi l’as-tu faite ? Et comment l’as-tu faite ?” La première question concerne le Tawhid : “Qui adoriez-vous ?” et la seconde le suivi : “Qu’avez-vous répondu aux messagers ?” Toute personne se tiendra devant Allah et sera questionnée sur ces deux points, le salut résidant dans la réalisation des deux attestations de foi : Nulle divinité ne mérite l’adoration en dehors d’Allah [sincérité] et Mohammed est le messager d’Allah [conformité]. Allah a dit (sens rapproché) : “Le jour où Allah les appellera et dira : ‘Où sont ceux que vous pensiez être Mes associés ?’” [Sourate 28, v.62], et “Le jour où Il les appellera et dira : ‘Qu’avez-vous répondu aux messagers ?’” [Sourate 28, v.65].
*[NDT] Cf. Madarij Al Salikin (2/366) de Ibn Al Qayyim et Sharh Al ‘Aquidah Al Tahawiya d’Ibn Abi Al’Iz (200).
Ibn Al Qayyim, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit : “Le cœur ne peut atteindre une pureté complète tant qu’il n’est pas préservé de cinq choses : le shirk, qui annule le tawhid, l’innovation, qui va à l’encontre de la sunnah, les désirs, qui contredisent l’ordre divin, l’insouciance, qui s’oppose au rappel, et les passions, qui vont à l’encontre de la purification et de la sincérité. Ces cinq choses sont des voiles qui s’interposent entre Allah et Ses serviteurs, et de chacune d’elles découlent de nombreuses ramifications, qu’il serait impossible de dénombrer.” [Al Da Wa Al Dawa (283)] ↩︎
Ighathatou Al Lahfan (1/10-12). ↩︎
- Rapporté par Al Bukhary en commentaire dans le chapitre intitulé
- “L’espoir et persistance”. Ibn Hajar l’a relaté dans Taghliq Al Ta’liq (5/158).
[C] Le cœur sain sait que cette demeure est éphémère, tandis que celle de l’au-delà est éternelle. Sa principale préoccupation est d’être parmi les gens de l’au-delà (ses enfants), en œuvrant par des actes d’obéissance dont il espère trouver la récompense le Jour où il rencontrera Allah. La force de la foi au Jour dernier a un effet direct sur la pureté du cœur : “Lorsque nous vivions autrefois parmi nos proches, nous vivions dans la crainte (du châtiment d’Allah).” [Sourate 52, v.62]. Cette conscience du Jour dernier, le jour de la rétribution et du jugement, aide le serviteur à réformer son cœur dans la droiture. C’est pourquoi la préoccupation pour l’au-delà compte parmi les signes du cœur sain. Les gens de science ont dit que la foi au Jour dernier comporte deux degrés :
La foi ferme, c’est le premier degré, sans lequel la foi en ce pilier n’est pas valable. C’est la conviction inébranlable et absolue qu’il y a une résurrection, un jugement, une rétribution, un enfer, et un paradis.
La foi enracinée, c’est le second degré, celui visé ici, qui consiste à avoir la conscience de ce jour dans le cœur, manifestée à travers les actes d’obéissance accomplis et les désobéissances délaissées. Comme Allah a dit (dans le sens approché) : “Et quiconque désire l’au-delà et s’efforce pour l’atteindre, avec les efforts nécessaires qui lui sont dus, tout en étant croyant, alors ceux-là sont ceux dont les efforts seront appréciés.” [Sourate 17, v.19].
[C] Son cœur est unifié autour d’un seul objectif : atteindre l’agrément d’Allah. Il n’est ni éparpillé ni divisé, fragmenté par les désirs, morcelé par les passions. Pour celui qui porte un cœur sain, cette résolution est placée devant ses yeux dans chacune de ses actions. Il aspire à l’agrément d’Allah et s’efforce de s’éloigner de tout ce qui pourrait provoquer Sa colère. ↩︎
[C] Le Prophète ﷺ a dit : “Le combattant (Mujahid) est celui qui lutte contre son Nafs dans l’obéissance à Allah.” [Hadith de Fadalah Ibn ‘Obayd, qu’Allah l’agrée, rapporté entre autres par l’imam Ahmad (23958) et authentifié par Cheikh Al Albani (cf. Hidayat Al Ruwat (1/72))] ↩︎
[C] La validité de l’œuvre repose sur deux piliers : la sincérité envers l’Adoré [Allah] et le suivi du Messager ﷺ. Il fait en sorte de rendre l’action saine en la purifiant de toute ostentation visuelle ou auditive, ou de toute volonté d’en tirer un intérêt mondain. De même, il la rend saine en veillant à ce qu’elle s’inscrive dans le suivi conforme du noble Messager ﷺ. ↩︎
[C] C’est une grande invocation. Il convient au musulman de s’y attacher et de la multiplier, car son nafs et sa guidée sont dans la Main d’Allah : « Toutes les grâces sont dans la Main d’Allah » et « Allah est Détenteur d’une immense grâce ». [Sourate 3, v.74 et v.75]. Le nafs ne peut avoir une véritable crainte d’Allah, ni être purifié sans qu’Allah lui accorde cette réussite. ↩︎
Rapporté par Ibn Hiban dans son Sahih (935), authentifié par Al Albani dans Al Silsilah Al Sahiha (3228).
[C] Comme le début de ce hadith l’indique, cette invocation fait partie des trésors les plus précieux et de grande valeur. Elle regroupe de multiples demandes diverses, dont le témoin argumentatif dans ce contexte est la parole du Prophète ﷺ : “Je Te demande un cœur sain”. Cette santé du cœur ne peut provenir que d’Allah, c’est pourquoi la personne qui désire le salut de son cœur doit multiplier les invocations, en particulier ces invocations prophétiques.
Remarquez que dans cette invocation, le cœur sain est associé à la langue véridique : “Je Te demande un cœur sain et une langue véridique.” Cela est dû au fait que ces deux organes sont capitaux chez l’homme, car ils ont un effet général sur tout le corps. En ce qui concerne le cœur, cela a été mentionné dans le hadith de Nu’man Ibn Bashir, qu’Allah l’agrée : “Certes, dans le corps, il y a un morceau de chair : s’il est sain, tout le corps sera sain, et s’il est corrompu, tout le corps sera corrompu. Il s’agit certainement du cœur”. Quant à la langue, le Prophète ﷺ a dit : “Lorsque le fils d’Adam atteint le matin, tous les membres implorent la langue. Ils disent : ‘Crains Allah en ce qui nous concerne, car nous ne faisons que te suivre. Si tu es droit, nous serons droits ; mais si tu dévies, alors nous dévions’.” [Rapporté par Al-Tirmidhi (2407), rendu bon par Cheikh Al Albani dans son Tahqiq].
C’est pour cette raison qu’il a été dit dans le passé : “L’homme est selon ses deux petits organes” : le cœur et la langue. L’homme n’est pas défini par son corps, sa taille, sa force, sa stature, sa puissance, etc., mais par ces deux membres : le cœur et la langue. Si ces organes sont sains, alors le corps dans son ensemble le sera également, mais s’ils sont corrompus, le corps le sera également. ↩︎